Résumé :
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Cet s'intéresse au rôle des administrations dans la mise en œuvre du droit au logement et dans la distribution inégale des chances et des délais d'attente pour l'accès au logement social. A l'image de ce que l'on observe depuis plusieurs années à l'entrée de l'enseignement supérieur, le placement des candidat.es au logement social s'opère aujourd'hui dans un champ toujours plus segmenté : diversification des filières, foisonnement de labels et de critères de priorisation, développement d'"itinéraire bis" pensés comme temporaires, multiplication des dispositifs d'accompagnement, etc. A l'appui d'un suivi statistique de 696 familles sans domicile hébergées à l'hôtel à Paris, cette enquête montre que l'inflation des labellisations "prioritaires" a engendré une spécialisation et une hiérarchisation entre les files d'attente dites "prioritaires" à l'entrée du parc social. elle révèle se surcroît que toute sortie de la file d'attente se paye au prix d'une relégation durable dans la compétition. L'auto-élimination des candidat.es enregistre en premier lieu le poids exorbitant du capital économique dans le tri des prétendant.es. elle affecte singulièrement les familles sans domicile les plus éloignées de l'emploi, mais aussi celles qui détiennent un petit capital social leur permettant de trouver d'autres portes de sortie chez des tiers ou dans le parc privé. L'article met, par ailleurs, en évidence le poids des stratégies de placement élaborées parles agent.es du guichet qui appartiennent, dans leur grande majorité, aux classes moyennes salariées du public. Les délais d'attente sont prescrits aux candidat.es en fonction d'attendus moraux mais aussi de stéréotypes sociaux. Pris dans leur ensemble, ces mécanismes de tri contribuent à la stratification interne aux classes populaires et à la redistribution inégalitaire das l'espace résidentiel d'individus partageant pourtant, initialement, un certain degré de proximité sociale.
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