Résumé :
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Cet article interroge la validité de la catégorie enseignante comme catégorie du politique en Afrique de l'Ouest pendant la période coloniale. Il cherche plus particulièrement à cerner dans quelle mesure les instituteurs issus de l’École normale William Ponty forment un groupe d'intérêt politique homogène à la veille des luttes pour les indépendances. Il montre comment les instituteurs, loin de former un groupe solidaire et homogène, constituent au contraire un agrégat travaillé par des logiques de dispersion et de dilution. Cependant, à partir des années 1930, le groupe est également revivifié par des logiques de (re)mobilisation qui s'appuient sur un espace public émergent. En 1945, alors que l'espace politique ouest-africain se libéralise, ce processus de (re)mobilisation est encore inachevé et les instituteurs forment un groupe encore désuni et dispersé. Le résultat de cette recherche pourrait servir à enrichir l'analyse des luttes pour l'indépendance. Il souligne, d'une part, l'intérêt qu'il y a à dénaturaliser les catégories du politique dont nous interrogeons encore trop rarement l'historicité, et suggère, d'autre part, que les luttes politiques des années 1950 ne se résument pas forcément à une série d'oppositions entre des élites rivales dont on assume l'existence mais qui consistent peut-être surtout dans la définition et la mobilisation de ces groupes d'élite.
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