Résumé :
|
Dans les royaumes du Menabe et du Boina de l'ouest malgache, la confection des reliques issues des corps des rois, le culte qui leur est rendu à travers la cérémonie du bain, le fait que leur détention soit la condition primordiale du pouvoir contribuent à singulariser la dynastie et le roi, porteur du Hasina, force d'origine sacré bénéfique, mais potentiellement dangereuse. La fabrication de reliques à partir des corps des souverains est commune en Afrique, mais est devenue la règle au moment de la formation des grandes monarchies au XVIIIe siècle qui y ont trouvé leur fondement idéologique. Dans la ville de Najnga (région du Boina), les reliquaires royaux sont connus ous lenom "andriamisara efa dahy". Ils ont représenté un enjeu de taille pour tous les régimes qui se sont succédé à la tête de l'île dans la mesure où l'obtention du pouvoir dépend de leur possession de la garde des clés du doany, lieu dans lequel ils sont conservés.
De fait, le pouvoir opérant fondamental des reliques nous conduit vers d'autres chemins à explorer. Avec l'Indépendance, elles cristallisent les turbulences de la nouvelle donne politique malgache, au moins du point de vue local, au travers d'un conflit dont l'enjeu est leur possession. Le contrôle du doany et des restes royaux entre dans le domaine du juridique et prendre figure publique, théâtrale, lors d'un interminable procès qui débute en 1957, qui s'est poursuivi sous différentes formes et au travers de plusieurs procédures, jusqu'à nos jours sans que jamais une solution ne soit trouvée. Le débat réel se situe en de ça du discours formel juridique et de façon logique nous changeons de registre. Cet article se propose d'explorer, en trois temps, l'idée d'un déboîtement entre le droit et la réalité au travers des différentes procédures qui se sont suivies depuis la première plainte en justice en 1957. Car, si le roi paraît nu, le culte atteint dans sa crédibilité, il n'en est sans doute rien au vu des derniers rebondissements de l'affaire et du énième refus d'admettre la décision juridique lors de la célébration du grand rituel royal de 2004. Nous pourrons ainsi nous demander sous quelle forme à l'heure actuelle ont perduré ces logiques profondes liées aux imaginaires du sacré.
|