Résumé :
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Le paradigme de la singerie est tentaculaire. S'il est de notoriété scientifique et médiatique que les grands singes, chimpanzés et gorilles, habitent, à côté des Pygmées, les forêt primaires du bassin du Congo considéré comme leur niche écologique naturelle, il est plus troublant de voir à quel point le primate habite aussi l'imaginaire des explorateurs, voyageurs et romanciers qui le prennent parfois comme personnage emblématique de leur remontée à la source du fleuve. Que leurs récits se penchent sur le berceau de l'humanité, se lancent à la poursuite du chaînon manquant, réfléchissent aux fondements de la violence et de la guerre, ou inventent un langage pour la première victime subalterne de l'homme, la passion de l'origine, aussi indistincte que fascinante, aboutit à confondre l'éthologie et l'ethnologie, à propager une vulgate évolutionniste, à réactiver les schémas de l'anthropologie physique ainsi que les clichés interculturels sur la race et la langue. Du "patois" au français en passant par le petit-nègre, de la pratique du "symbole" en vigueur à l'école coloniale à la théorie de la "symbiose" francophone, de la bestialité grégaire à la bêtise stéréotypée, le singe apparaît comme le signe crypté d'un éco-système mimétique, ne cessant de montrer et descendre sur cet arbre qui cache les racines primitives et raciologiques du concept Congo.
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